«Ô roi, tu n’es pas parti mort, tu es parti vivant »

La désormais célèbre “affaire” connue sous le nom de “mystère d’Orion” remonte à quelques années déjà. C’est en 1994 que parut à Londres «The Orion Mystery. Unlocking the Secrets of the Pyramids ». C’était l’œuvre de Robert Bauval, un ingénieur des travaux publics passionné d’astronomie, d’origine belge mais né à Alexandrie, et assisté pour la circonstance par un certain Adrian Gilbert, éditeur. En 1996, associé cette fois au journaliste Graham Hancock, il récidiva avec «Keeper of Genesis. A Quest for the Hidden Legacy of Mankind ». Ne nous y trompons pas, les coauteurs n’y sont pas pour grand-chose. Bauval travaillait, seul, sur la question depuis 1983. De loin en loin, il avait publié un article dans la revue savante d’Oxford, Discussions in Egyptology, et les germes de sa théorie s’y trouvaient déjà. Mais quand parut le livre et que ses détracteurs se mirent en branle pour éteindre l’incendie, aucun de ces “gardiens du temple” n’avait lu ces articles. La plupart n’étaient d’ailleurs pas égyptologues. Ils s’en prenaient avant tout à des points discutables voire spéculatifs, mais négligèrent royalement l'arrière-plan égyptologique de tout cela. Dans ses multiples mises au point, Bauval s’en plaindra plus d’une fois. Car lui avait compris qu’il fallait prendre en compte de nombreux facteurs et questionner les archéologues. Ce qu’il fit en toute honnêteté, de sorte qu’à chaque étape il lui fut suggéré quel sujet approfondir pour poursuivre dans la voie qu’il s’était tracée. Car bien avant lui, des érudits incontestés s’étaient déjà attaqués à l’une ou l’autre question ayant des liens avec la problématique qu’il soulevait. Mais les égyptologues s’en étaient fort peu émus et ces travaux n’avaient que rarement atteint le grand public, car dans les rares cas où on les mentionne, les questions qu’ils suscitent ne sont évoquées que de manière fort allusive. A chaque fois qu’il traite de leurs analyses, Bauval ne manque jamais de leur rendre hommage : ils ont nom Wallis Budge, Capart, Badawy, Trimble, Wamwright, Hassan, Rundie Clark et bien d’autres. La théorie de Bauval sur la “corrélation d’Orion” n’est qu’un apport de plus dans une longue chaîne d’investigations passionnantes. Ce qu’a fait l’auteur c’est en quelque sorte, sur la base de sa propre hypothèse nouvelle, de tenter de “scénariser” un peu tout cela. D’où le succès public, cette fois-ci. D’où aussi la gêne de nombre d’égyptologues, pas nécessairement contre, loin s’en faut, mais plutôt embarrassés d’avoir peut-être négligé un peu trop des travaux loin d’être inintéressants. Disons, de manière familière, que cela n’avait pas “fait tilt” dans leur esprit...

La matière est à ce point abondante, lorsqu’on s’engage dans cette quête, qu’il eût fallu, à mon avis, intituler le livre “Les mystères d’Orion”. Tout en exposant les théories de Robert Bauval lorsqu’elles se présenteront, je suis loin de m’être limité à elles seules. J’ai mis trois ans à étoffer ce dossier à l’aide des discussions intenses qui ont suivi la parution de l’ouvrage. Mais je les ai également mis à profit pour tenter de répondre le plus complètement possible à des questions d’ordre archéologique qui se posaient à chaque nouvelle étape, ce que Bauval (ni ses détracteurs d’ailleurs) n’avait fait. Même si la raison d’être de certains chapitres peut de prime abord ne pas être toujours évidente, on verra par la suite que chaque élément s’emboîtera dans un ensemble bien plus vaste. Car n’importe quel chapitre, mystère d’Orion ou pas, contient son pesant d’énigmes non encore résolues et que j’ai toutes trouvées passionnantes. J’espère que le lecteur partagera mon plaisir de la découverte. On n’oubliera pas non plus que ceci est Kadath, et personne ne s’étonnera que peu de sujets iront dans le sens du prêt-à-penser de l’égyptologiquement correct. Mais, fidèles à notre démarche, sans renier jamais les acquis de la science... pour autant que ce soient bien des “acquis" ! Dans l’ordre des chapitres tels qu’ils vont suivre, voici d’ailleurs une série d’énoncés qui vont être soumis à discussion... et soumis à rude épreuve parfois.

• Osiris est un dieu relativement récent dans la cosmogonie égyptienne, et on n’en trouve la première trace qu’à partir de la Ve dynastie, après la construction des pyramides de Gizeh.
• Les Égyptiens de toutes les époques ne vénéraient pas tant les étoiles que le dieu-soleil Rê, et la pyramide reflète cette symbolique solaire.
• Les Textes des Pyramides ne sont que verbiage mystique et formules magiques, uniquement motivés par le désir naïf de vivre éternellement.
• Les conduits dits d’aération, dans la pyramide de Kheops, n’avaient d’autre raison d’être que d’assurer une ventilation convenable.
• Le choix du plateau de Gizeh et l’alignement de ses trois pyramides n’était motivé que par des considérations d’ordre géologique.
• Dans la cosmogonie, la pierre benben, et son prolongement architectural, le pyramidion, sont des symboles purement solaires.
• Les anciens Égyptiens ne s’intéressaient que très peu à l’astronomie et ne disposaient d’ailleurs que de moyens d’observation fort rudimentaires.
• Le but de la pyramide n’est autre que de servir de sépulture à un pharaon mégalomane.
• Kheops n’a pu construire sa pyramide qu’à partir de -2590 ou -2551 au plus tard, et toutes les chambres en sont connues et explorées.
• Le phénomène de précession des équinoxes fut découvert par Hipparque d’Alexandrie -129 et personne avant lui n’en avait eu connaissance.

Voilà les apparentes certitudes des égyptologues. Nous nous retrouverons à l’issue du prochain numéro (car il en faudra deux pour passer tout ceci en revue !). Ah, une dernière précision encore. Il va sans dire que, pour ma part, je n’ai rien à démontrer et ne suis pas habilité à trancher. Mais cela va encore mieux en le disant.

Ivan Verheyden


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