Témoignages
Ivan, kadathien en chef |
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À mon humble avis, affirmer péremptoirement que nous étions fils de Planète et de leurs magiciens fondateurs simplifie trop l’apparition de la revue Kadath. Bien sûr, nous étions lecteurs mais le hasard a bien joué pour constituer une équipe. Nous nous rencontrons à la SOBEPS (Société Belge d’Études des Phénomènes Spatiaux) et la camaraderie d’intérêt en l’histoire et l’archéologie dépasse celle des ovnis. De discussions en apartés, Jacques Victoor, un gaillard au bon bagou, m’invite à prendre un pot à son appartement afin de m’éclairer d’une possible idée… Ce soir-là, Jacques parle d’énigmes de l’archéologie. Nous rejoint un peu plus tard, Ivan Verheyden que j’avais déjà vaguement croisé. Recharge des chopes. Ivan est l’opposé de Jacques. Il affiche un sérieux plutôt imperturbable, non dénué d’humour mais parfois il faut chercher, et il présente – avec cette précision intellectuelle qui fait partie intégrante de sa personnalité – son projet. Créer une revue qui ferait le point sur les différentes hypothèses portant sur lesdites incertitudes archéologiques, rien de moins. Le « business plan » - hé oui, publier coûte ! – est suffisamment avancé pour attirer mon attention. Il faut dire que les compères ont fait leurs études en médecine ensemble à l’université de Louvain et, lors d’un voyage commun à Berlin, sont allés uriner sur le mur de la honte (authentique). Le genre d’anecdote qui installe la sympathie. Une écurie d’historiens amateurs se forme sous la houlette d’Ivan. Son ami Marcel Homet, archéologue français connu et agent du Special Operations Executive britannique pendant la guerre, le soutient avec vigueur. C’est curieux, encore aujourd’hui, je me demande s’il n’avait pas une conception d’avance sur le calibre de sa revue. Ne fait-il pas appel à son ami le peintre Gérard Deuquet pour l’illustration graphique de couverture et la création d’un lettrage de rubrique si particulier ? Détails esthétiques étayant, sans aucun doute, la qualité éditoriale qui sera reconnue par la presse dès les premières parutions. Un quarteron de divas renâcla... Nervosité qu’Ivan savait désamorcer avec talent, tout en développant les appuis et collaborations au niveau international. Je ne me souviens pas l’avoir vu un jour fâché, toutefois ses notes internes pouvaient s’avérer parfois sévères si pas cassantes. Il faut un vrai patron pour tenir pendant quarante années de publication. Ce dont je suis absolument certain ? Kadath a marqué profondément nos existences, ouvert nos esprits, fait rencontrer des personnes exceptionnelles : c’est, sans conteste aucun, l’œuvre d’Ivan, notre rédacteur en chef. Cette expérience et la rigueur qu’il insufflait m’a bien servi dans une autre escapade de loisir. Puis le temps prend sa revanche, notre ami a passé le fleuve Miskatonic. Maintenant, il discute avec les Grands Anciens. Farewell Ivan. |
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Comment un entomologiste comme moi a-t-il rencontré Ivan et s’est-il retrouvé dans l’équipe de Kadath ? Si ma mémoire est bonne, c’est suite à une petite annonce, lue dans la revue à la fin des années ’80, du genre « Cherche auteur… ». Pourquoi y ai-je répondu ? Sans doute parce que je lisais déjà Kadath et que le ver était dans le fruit… Après des premiers échanges épistolaires et quelques articles (le premier dans le n° 74, si je ne m’abuse), il y a eu le premier contact physique. J’habitais alors à Genève et je me suis rendu à Bruxelles en 1992 (ou 1993 ?) pour y rencontrer les Kadathiens. D’emblée, j’ai été frappé par l’énorme bibliothèque d’Ivan et son vaste éclectisme : à côté d’ouvrages de médecine et d’archéologie très sérieux, on y trouvait les romans de Lovecraft (entre autres auteurs fantastiques) et on pouvait y voir la célèbre fusée marquée de blanc et de rouge, ainsi que d’autres objets relevant de la tintinologie. Bien que d’abord un peu surpris, j’ai tout de suite senti que j’étais à la bonne adresse. En effet, l’étude minutieuse des insectes ne m’a jamais empêché de m’intéresser à bien d’autres choses. Ce fut le début d’une fructueuse et agréable collaboration (en tout cas pour moi), interrompue un temps en raison d’un différend concernant le maïs (comprenne qui pourra !). Tout le monde n’a pas le calme olympien d’Ivan, mais sa diplomatie et son tact finissent par tout arranger. Depuis, la collaboration a repris et je garde de merveilleux souvenirs des réunions dans l’antre d’Ivan et des repas au restaurant après l’assemblée générale. Il s’est même une fois terminé si tard que j’ai manqué le dernier train pour Liège et qu’Ivan a dû venir me repêcher à la gare du Nord. Sans lui, Dieu seul sait ce qui se serait passé ! Ce qui m’a frappé d’emblée chez Ivan, outre sa gentillesse, c’est son calme et une certaine lenteur, que je qualifiais en moi-même de « sénatoriale ». Je l’imaginais parfois en patricien romain, revêtu d’une toge et se promenant lentement en dissertant calmement. Mais cette lenteur apparente n’empêchait pas une redoutable efficacité, ainsi qu’une précision et une méticulosité d’entomologiste (je parle en connaissance de cause !). J’avoue avoir envié plus d’une fois ses connaissances encyclopédiques et sa mémoire prodigieuse. Sa méthode de travail était rigoureuse, bien qu’apparemment un peu « archaïque », point que je ne saurais critiquer, n’étant pas moi-même un stakhanoviste de l’ordinateur et un fanatique de l’informatique. La capacité d’écoute d’Ivan était énorme et il était heureusement moins « bouillant » que certains. Moins bouillant, mais tout aussi passionné. Il faisait preuve d’une patience infinie mais aussi d’une volonté inflexible. Son ouverture d’esprit et son aptitude à la discussion, sans polémique et excitation stériles, lui ont permis de résoudre bien des conflits. Nous avons eu des divergences de vue à propos de bien des sujets, voire de collaborateurs extérieurs de Kadath, que je jugeais peu crédibles, voire même sulfureux. Une discussion posée et bien argumentée avec Ivan finissait toujours par remettre les choses à leur juste place (« Ne pas jeter le bébé avec l’eau du bain », me disait-il souvent.) Enfin, sous des dehors doux et presque timides, Ivan faisait preuve d’un grand courage tant moral que physique : il a longtemps supporté avec force de nombreux et pénibles problèmes de santé. Sa discrétion et sa pudeur ont fait que je ne l’ai appris que tardivement. |
J'apprends avec tristesse la disparition d'Ivan Verheyden. Si vous le pouvez, merci d'adresser à ses proches mes condoléances et toute ma sympathie pour ce grand personnage, disparu trop tôt.
G. M. – Reims, France
Je présente mes plus sincères condoléances à sa famille, il fut pour moi le créateur d’une revue sérieuse que j’ai achetée depuis le numéro 1 des débuts, mon papa décédé en 2005 devenu passionné de sa revue y a même écrit et entretenu un bon contact avec lui et son équipe. Il nous manquera à tous !
J. V. – Louette saint Denis, France
Lecteur depuis le n° 1, j'ai vécu avec un intérêt toujours renouvelé la découverte des articles merveilleusement choisis, et l'attente de la parution d'une revue parfois reportée me faisait craindre la démission d'une équipe qui aurait épuisé les sujets d'intérêt. Le rôle du rédacteur en chef fut tenu avec une persévérance qui force l'admiration. À toute l'équipe, ma sympathie car une personnalité aussi remarquable que Monsieur Verheyden manquera à l'équipe qui, je l'espère, pourra continuer à nous éclairer.
J.-F. D.